Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/300

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adoré. Un père dans ses foyers domestiques n’a donc plus un rempart inexpugnable contre l’enlèvement de sa fille, ni un époux contre celui d’une tendre épouse. Bagatelle ! eh bien, quel est le chef de famille qui ne tremblera pas désormais, si, dans sa propre maison, il n’est à l’abri d’une transportation, qui, sans l’ordonnance et l’exertion d’une loi réelle, sera cependant revêtue de toute légalité administratrice, par la seule force du soupçon : on veut donc transformer la province de Québec en désert, ou en repaire unique de quelques animaux domestiques, si faits pour le joug, qu’ils ne s’effaroucheront ni de la pesanteur, ni de son infamie. Les loyalistes qui s’étaient réfugiés dans la colonie parlent déjà hautement de leur départ, si on ne leur donne pas une sécurité constitutionnelle de la durée de leurs établissements. Eh, mais ! milord, ce n’est pas une liberté si chancelante que notre auguste souverain et son parlement ont conspiré de concert à faire revivre parmi nous. Est-il donc dans la sphère du pouvoir d’un petit corps législatif de province de dégrader ainsi, d’amoindrir, de réduire même au néant les bienfaits législatifs de la munificence royale et parlementaire ? Si une poignée de petits sujets sont autorisés à offrir une si grosse insulte à la majesté du trône et à celle du premier sénat du royaume, il ne nous reste donc plus en commun que de ronger et mordre notre frein en silence et de nous consoler de nos disgrâces provinciales dans les disgrâces bien plus éclatantes