Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bien plus sensible et plus délicat de pouvoir peindre tous ses moines ce qu’ils devraient être que ce qu’ils ont indignement été.

Mais, tandis que tant d’étude et tant d’art monacal était déployé pour aggraver sa captivité au dedans, les injustices les plus atroces se mettaient de la partie et se liguait de complot pour ruiner de fond en comble sa fortune au dehors. Ses magasins, sa belle maison de Montréal, ses domaines seigneuriaux étaient livrés à un pillage général. Il s’était élevé un litige entre lui et son commissionnaire à Londres : la contestation avait été déférée à un tribunal de judicature : on attendit un jour de dimanche, veille du jugement, pour lui intimer une assignation à comparaître en personne le lendemain matin à la cour, quoiqu’une baïonnette, en faction nuit et jour devant la porte de sa chambre, fut pointée pour y en disputer la sortie à la dragonne. À peine lui resta-t-il le temps de faire parvenir à un avocat la commission de répondre par substitut à la semonce. L’homme de loi n’ouvrit la bouche que pour requérir de la cour un répit pour prendre, à loisir, connaissance d’une cause qu’il n’avait en mains que depuis quelques moments : la justice de la demande frappait les yeux. N’importe ; le chirurgien major de la garnison, juge tout à la fois de la province par le contraste le plus inouï, décida, la lancette à la main, que tant de condescendance, ou plutôt d’équité, n’était pas faite pour un prisonnier d’État. En France, on aurait cru insulter