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LA SANTÉ.

lait vieilles soutanes, marchands de bêtises et on leur adressait d’autres aménités qu’ils faisaient semblant de ne pas entendre. La maison passait pour riche. On parlait volontiers des trésors que l’on y cachait et de l’esprit réactionnaire qui en animait les habitants. Les dominicains laissaient dire, faisaient la sourde oreille, se montraient peu en public et s’en fiaient à la grâce de Dieu.

Sérizier avait établi son quartier général dans le château du marquis de la Place, contigu à l’école d’Albert le Grand ; il était entouré de son 101e bataillon. Des fenêtres du salon qu’il occupait, voyant la maison et le jardin des dominicains, il disait à ses amis et surtout à son confident Louis Boin, corroyeur comme lui et surnommé Bobèche : « Tous ces curés-là ne sont bons qu’à être brûlés ! » Bobèche opinait du képi. « Oui, répondait-il, ils abrutissent le peuple ! » La prise du fort d’Issy par l’armée française aggrava la position déjà fort précaire des dominicains. Les fédérés ayant été forcés d’évacuer les défenses du fort se replièrent vers Arcueil et Cachan, de sorte que toute la 13e légion vint camper aux environs de l’école. Les pères faisaient contre fortune bon cœur, mais ils commençaient à comprendre que leur ambulance ne leur servirait pas toujours de sauvegarde.

Le 17 mai, le feu prit dans la toiture du château de la Place ; les dominicains retroussèrent leur robe et s’employèrent si bien qu’ils maîtrisèrent ce commencement d’incendie. Ils furent mandés auprès de Sérizier. S’attendant à être félicités pour leur conduite, ils prenaient déjà l’air modeste qui convient à des hommes revenus des vanités de ce bas monde, et ne furent pas peu surpris de s’entendre traiter de mouchards et de sergents de ville déguisés. Leur étonnement redoubla lorsque Sérizier prit la peine de leur démontrer qu’ils