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LES DOMINICAINS D’ARCUEIL.

devant lui. Sa haine contre le clergé eût été comique, si elle n’avait produit d’irréparables catastrophes ; il avait pris plaisir à souiller quelques églises par ses orgies et faisait procéder à la vente à l’encan des objets contenus dans la chapelle Bréa, lorsque l’entrée des troupes françaises à Paris vint l’interrompre. Il fut non seulement assassin, mais incendiaire ; car c’est lui qui fit allumer le feu à la manufacture des Gobelins. C’était un homme de taille moyenne, carré des épaules, l’œil très mobile et inquiet, la voix éraillée par l’eau-de-vie, le front bas, la lèvre lourde, le menton fuyant : une tête de boule-dogue mâtiné de mandrill.

L’objectif principal de Sérizier était l’école d’Albert le Grand, fondée par les dominicains enseignants, non loin du xiiie arrondissement, à deux kilomètres des fortifications, près du fort de Bicêtre et de la redoute des Hautes-Bruyères. La maison des dominicains d’Arcueil, comme on l’appelait vulgairement, était là dans un mauvais voisinage, car elle confinait aux postes avancés, où l’insurrection avait ses principaux ouvrages de résistance. Pendant le siège, l’école avait été organisée en ambulance, et cette destination lui fut conservée sous la Commune. Certes, les dominicains ne pouvaient aimer ni servir un prétendu gouvernement qui convertissait les églises en clubs, interdisait l’exercice du culte et faisait incarcérer les prêtres ; mais autant par esprit de charité que par intérêt de conservation personnelle, ils recueillaient les fédérés blessés et les soignaient avec dévouement sans leur demander compte de leurs croyances ou de leur impiété. Ils purent se figurer qu’ils seraient respectés, que l’on continuerait à utiliser leurs services et que leur maison serait protégée par la croix de Genève. Jusqu’aux avant-derniers jours de la Commune ils n’eurent guère à supporter que des insultes ; on les appe-