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LA MORT DES OTAGES.

erreur. Une discussion s’éleva en effet dans le greffe de la prison, mais sur un autre objet, que nous ferons connaître. La cour martiale n’était point d’accord sur le chiffre des otages que l’on devait tuer ; le nombre soixante-six fut proposé et écarté, « parce que ça ferait trop d’embarras. » On s’arrêta au nombre de six : deux noms seulement furent désignés, celui de M.  Bonjean et celui de l’archevêque de Paris.

Pendant que l’on délibérait sur la destinée des otages, ceux-ci avaient, comme la veille, été conduits au chemin de ronde qui leur servait de préau. Rien, extérieurement du moins, n’était changé dans leur situation : ils avaient eu leur distribution de vivres, avaient causé avec les surveillants et avaient été reconduits à quatre heures dans leur section. Ils avaient remarqué cependant, avec une certaine surprise, qu’on les avait engagés à se hâter lorsqu’ils remontaient l’escalier et que leurs cellules, au lieu de rester ouvertes jusqu’à l’heure du bouclage, avaient été fermées au verrou et à la clef. Pendant la promenade, Mgr  Darboy s’était plaint d’être dans un cabanon trop étroit où il n’avait que son grabat pour s’asseoir. L’abbé de Marsy lui avait alors proposé de lui céder sa cellule, le no  23, qui était plus spacieuse, munie d’une chaise, d’une table et même d’un petit porte-manteau. L’archevêque avait accepté. Sur le croisillon de fer qui sépare le judas de la porte, l’abbé de Marsy avait dessiné les instruments de la passion et écrit : Robur mentis, viri salus ; comme au Dépôt de la préfecture de police, Mgr  Darboy avait tracé un crucifix sur le mur de la cellule qui lui avait été attribuée.

La journée eût été normale à la Grande-Roquette si, dans la matinée, on n’y eût amené quatre femmes. Conduites par des fédérés, elles furent poussées au greffe et ordre fut donné de les incarcérer. Elles ve-