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LA GRANDE-ROQUETTE.

Pendant que cet honnête homme fuyait la maison où s’amassaient les crimes, Ramain, furieux, appelait Henrion, qui ne répondait guère. Genton demandait si l’on se moquait de lui ; François perdait contenance, et Mégy, glissant une cartouche dans son fusil, disait : « Nous allons voir ! » Ramain dit alors à François : « Faites monter le peloton au premier étage, je cours chercher mes clefs au guichet central, je passerai par l’escalier de secours et j’ouvrirai par le couloir. » Lourdement les quarante hommes, ayant en tête François, Genton, Mégy, Benjamin Sicard et Vérig, gravirent l’escalier. Ramain enjamba la cour intérieure, pénétra dans le guichet central, enleva les clefs accrochées à un clou, et donnant la liste des otages au surveillant Beaucé, il lui dit : « Va faire l’appel ; » puis lestement il monta les degrés de l’escalier, franchit la galerie de la quatrième section et ouvrit la grille. Le peloton se divisa en deux groupes à peu près égaux, de vingt hommes chacun ; l’un resta massé devant la grille ouverte ; l’autre traversa le couloir, longeant les cellules où les otages étaient enfermés, descendit l’escalier de secours et fit halte dans le jardin de l’infirmerie. « Nous entendions les battements de notre cœur, » a dit un des otages survivants. Le bruit des pas cadencés, le froissement des armes ne leur laissaient point de doute ; ils comprirent que l’heure était venue. Qui allait mourir ? Tous se préparèrent.

Ramain attendait le surveillant Beaucé, auquel il avait remis la liste ; ne le voyant pas venir, il descendit le petit escalier pour aller le chercher au guichet central. Beaucé s’était disposé à obéir, croyant accomplir une formalité sans importance ; mais au moment où il allait se rendre à la quatrième section pour y appeler les six détenus désignés, il se croisa avec le détachement du peloton d’exécution, qui attendait dans le quar-