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LA GRANDE-ROQUETTE.

de pardon les uns pour les autres. Les lois de sang que la Commune avait promulguées et appliquées retombaient sur elle ; à son tour, elle allait mourir égorgée.

L’illusion a-t-elle été sincère chez les chefs de l’insurrection ? ont-ils cru que, répudiés par le pays tout entier, attaqués par l’armée française, menacés par les troupes allemandes qui auraient forcé l’entrée de Paris si le gouvernement légal ne se fût enfin décidé à agir[1], ont-ils cru que leur cause sans drapeau, sans principe et sans nom pourrait triompher et n’était pas condamnée à la mort violente ? On pourrait le supposer en se reportant à certains documents de l’époque. Le 24 mai, le jour même où l’assassinat des otages brisait toute chance de conciliation, on afficha dans Paris une proclamation que les membres du Comité central avaient rédigée la veille. On y lisait, avec stupeur, les conditions proposées de puissance à puissance : « 1o l’Assemblée nationale, dont le rôle est terminé, doit se dissoudre ; 2o la Commune se dissoudra également ; 3o l’armée, dite régulière quittera Paris et devra s’en éloigner d’au moins vingt-cinq kilomètres. » On croit rêver. Si quelques hommes, dont le cerveau était perverti par le rôle qu’ils avaient arraché aux évènements, ont pu s’imaginer que la victoire leur resterait, il n’en était pas de même des spectateurs de cette descente de la Courtille révolutionnaire. Nul, à Paris, ne crut à la durée de ce burlesque pouvoir et parmi ceux qui eurent le courage de l’exercer, personne ne conservait plus d’espérance à la date du 25 mai. Le plus simple raisonnement, à

  1. « La Commune… retarde l’évacuation du territoire par les Allemands et vous expose à une nouvelle attaque de leur part, qu’ils se déclarent prêts à exécuter sans merci, si nous ne venons pas nous-mêmes comprimer l’insurrection. » Proclamation du gouvernement de la république française aux Parisiens, 8 mai 1871.