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Page:Du Camp - Les Convulsions de Paris, tome 1.djvu/54

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mier acte d’ingérence dans la direction des affaires publiques est à noter ; le 30 mars, il a publié l’ordre que voici : — Faire arrêter tous les trains se dirigeant vers Paris, Ouest-Ceinture ; mettre un homme énergique avec un poste, jour et nuit cet homme devra avoir une poutre pour monter la garde ; à l’arrivée de chaque train, il devra faire dérailler, s’il ne s’arrête pas. — La phrase est peu grammaticale, mais elle fut comprise, et l’on se conforma à l’ordre qu’elle contenait.

Le fait d’un chef de corps élu volontairement réfractaire et n’obéissant qu’aux injonctions d’un pouvoir occulte ne fut point isolé, et l’on pourrait citer un grand nombre d’actes semblables qui se produisirent sur tous les points de Paris depuis la formation du Comité central. C’était une preuve que bien du temps déjà avait été perdu, qu’il n’en fallait plus perdre et que l’heure était venue d’entrer en négociations ou en lutte contre un parti révolté qui se fortifiait de jour en jour. En effet, sans compter diverses places d’armes établies et bien gardées dans Paris, les quartiers élevés de Belleville et la butte Montmartre, pourvus de canons et de munitions, étaient à cette heure de véritables forteresses. La partie administrative du gouvernement semblait pleine de quiétude et regardait ces préparatifs de défense ou d’attaque comme un enfantillage sans gravité. Le secrétaire général d’un ministère disait en souriant : « Leur artillerie n’est composée que de lunettes, car leurs canons n’ont pas de percuteur. — Mais, lui répondit-on, le premier serrurier venu pourra leur en faire. — Bah ! répliqua-t-il, ils n’y penseront pas. » Ils y pensèrent, et la population de Paris commençait a s’inquiéter d’un état de choses qui entretenait l’agitation, prolongeait le chômage, et menaçait d’aboutir à la guerre civile.

Le Comité central ne s’endormait pas ; il était décidé