Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/122

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bile ; l’inexpérience a causé bien des erreurs et bien des retards, mais les plus considérables étaient dus aux conditions mêmes de l’atmosphère. Nous nous rappelons tous le rôle que la nuit et le brouillard jouaient dans l’interruption des dépêches. Le langage de la télégraphie aérienne a gardé jusqu’au dernier jour une trace vivante de l’époque qui l’a vu naître ; au lieu de brouillard, on signalait brumaire. Dans les grandes chaleurs, par ces temps énervants et lourde qui laissent au ciel toute sa pureté, mais nous alanguissent sous le souffle du siroco, les communications télégraphiques étaient impossibles. Les ondulations miroitantes de l’atmosphère, surtout pour les stations placées près des lieux marécageux, décomposaient, pour ainsi dire, les gestes de l’appareil, les rendaient illisibles et les perdaient dans une sorte d’éblouissement analogue à celui que produit le dégagement du gaz carbonique. Ces jours-là, il n’y avait rien à faire ; les employés se croisaient les bras et le télégraphe faisait comme eux. Toutes ces conditions atmosphériques apportaient une telle perturbation dans le service, que Chappe-Chaumont a pu écrire : « J’ai calculé que sur 8 760 heures qui composent l’année, il y a au plus 2 190 heures pendant lesquelles on puisse communiquer avec le télégraphe aérien[1]. »

Toutes ces difficultés avaient frappé Claude Chappe, lorsque ayant enfin construit la ligne, de Paris à Lille, il put multiplier ses observations en raison directe du nombre de stations qu’il mettait en mouvement et de l’espace qu’il avait à franchir. Il ne se découragea pas, car il sentit que son invention était alors unique pour les résultats qu’elle obtenait. Un arrêté du 12 vendémiaire an III ordonna la construction de la ligne de

  1. Histoire de la Télégraphie, Introduction