Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/205

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en chantier comme des fagots ; chacun d’eux est muni d’une étiquette indicative. La comptabilité est fort bien tenue et varie selon que les objets ont été trouvés dans des voitures de louage, dans des omnibus, dans des wagons de chemins de fer, dans des hôtels garnis, sur la voie publique ou qu’ils proviennent de contraventions. Il y a un registre particulièrement affecté aux parapluies. Les restitutions sont en moyenne de 40 pour 100 ; cependant au mois de mars 1867 le dépôt central gardait 19 636 objets trouvés dans les voitures pendant l’année 1866 et qui n’ont pas encore été réclamés ; sur ce nombre, il faut compter 6 225 parapluies. Tout est enregistré, contrôlé, catalogué. Chaque objet, quel qu’il soit, fût-ce un gant dépareillé, à sa feuille d’entrée, sa place désignée, son bulletin de sortie ou son procès-verbal de livraison au domaine, qui devient propriétaire définitif au bout de trois ans.

Il est triste d’avoir à constater, mais il est certain, que l’étroite surveillance dont les cochers sont l’objet, les a rendus plus honnêtes que par le passé. Leur probité s’est accrue en proportion exacte du contrôle. Aussi les cochers fidèles, dont jadis on faisait des enseignes de cabaret, sont moins rares aujourd’hui qu’autrefois. Le diable n’y perd rien sans doute ; mais s’ils enragent d’être forcés à de pénibles restitutions, ils ont du moins plus de philosophie qu’un cocher russe dont on m’a conté l’histoire. M. X. gagne trente mille roubles au jeu ; à minuit, il quitte la réunion où il était, monte dans un coupé de louage qu’il avait pris au mois, rentre chez lui et s’aperçoit aussitôt qu’il a oublié ses billets de banque sur les coussins de la voiture. Il court à la remise, trouve le cocher occupé à donner l’avoine à son cheval, ouvre le coupé et y reprend les 30 000 roubles qui n’avaient même pas été aperçus. À cette vue, le cocher se frappe la tête, saisit un licou, le passe dans une