Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/237

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de vie, de mouvement, de vigueur, qu’on a pu améliorer depuis et rendre presque parfaits, mais qui sont restés les organes essentiels et primordiaux de toute machine destinée à la traction.

Le moteur étant trouvé, comme la voie, les chemins de fer étaient créés. C’était une révolution analogue à celle qui, par la découverte de Gutenberg, avait substitué l’imprimerie à l’art des copistes. Dans sa biographie de James Watt, Arago se sert d’une comparaison saisissante pour faire comprendre à quelle puissance de force et à quelle rapidité d’action l’homme parvenait, grâce à la machine à vapeur : « L’ascension du mont Blanc, dit-il, à partir de la vallée de Chamouny, est considérée à juste titre comme l’œuvre la plus pénible qu’un homme puisse exécuter en deux jours. Ainsi le maximum mécanique dont nous soyons capables en deux fois vingt-quatre heures, est mesuré par le transport du poids de notre corps à la hauteur du mont Blanc. Ce travail ou l’équivalent, une machine à vapeur l’exécute en brûlant un kilogramme de charbon de terre. Watt a donc établi que la force journalière d’un homme ne dépasse pas celle qui est renfermée dans 500 grammes de houille. »

L’invention devait avoir d’incalculables conséquences ; mais le plus difficile restait à faire, il fallait qu’elle sortît du domaine de la science industrielle et entrât dans nos mœurs. La France y fut réfractaire à un point qu’il serait bien difficile de comprendre aujourd’hui, si nous ne savions que l’esprit de routine semble être l’âme même d’une nation dont l’entêtement seul égale la mobilité. Une ordonnance du 26 février 1823 avait autorisé la création d’un chemin de fer entre Saint-Étienne et Andrézieux ; inauguré cinq ans après, le 1er octobre 1828, il ne servait guère qu’au transport des marchandises. Ce fut ce bassin houiller qui donna l’exemple au reste du pays, les voies ferrées y furent promptement adoptées