gnes, où s’élèvent aujourd’hui la Manufacture des tabacs et le Garde-Meuble, n’a été jointe à la rive gauche que depuis 1820. Son premier nom était fort irrévérencieux ; elle doit le second aux cygnes que Louis XIV avait fait mettre sur la Seine en 1676 et qui allaient chercher un refuge et déposer leurs couvées dans les roseaux dont l’île était entourée ; elle servit de point de mire à bien des faiseurs de projets, et, en 1785, un architecte, nommé Poyet, proposa d’y bâtir un nouvel Hôtel-Dieu qui aurait eu exactement la forme du Colisée de Rome. Son mémoire, accompagné de plans, est extrêmement curieux à parcourir et prouve un homme qui avait des idées aussi grandioses que pratiques[1].
L’annexion de la banlieue a fait entrer une île nouvelle à Paris. Est-ce bien une île ? À la voir, on en pourrait douter : elle ressemble à une étroite jetée qui prolonge la pile médiane du pont de Grenelle ; on la nomme l’allée des Cygnes ; elle ne porte aucune habitation, mais elle est le paradis des pêcheurs à la ligne. Sur ses berges verdoyantes, ils se réunissent attentifs et silencieux ; c’est le petit bras de la Seine, où ne passent pas les bateaux à vapeur, qui est le théâtre de leurs exploits. L’ablette abonde, le goujon donne et parfois même on a la chance d’enlever un barbillon, à la grande jalousie des concurrents voisins.
Il faut aussi parler des ponts, car ils appartiennent à la Seine dont ils joignent les deux rives et dont ils ont
- ↑ Mémoire sur la nécessité de transférer et reconstruire l’Hôtel-Dieu de Paris, etc, par le sieur Poyet, architecte et contrôleur des bâtiments de la ville (1785). Ce projet n’était point nouveau, car Barbier, Chronique de la régence et du règne de Louis XIV, après avoir raconté l’incendie qui détruisit une partie de l’Hôtel-Dieu au mois d’août 1737, ajoute : « Le public souhaiteroit fort que cet accident donnât lieu à ôter l’Hôtel-Dieu du milieu de Paris pour le transporter dans l’ile Maquerelle, au-dessus des Invalides, attendu que la quantité d’ordures qui sortent de cet hôpital par une lessive continuelle doit corrompre l’eau que l’on puise au-dessous pour boire dans tout Paris. »