Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/333

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Paris. Cette maigre industrie tend à disparaître ; elle est remplacée par les dragueurs à vapeur qui fouillent la haute Seine au-dessus de Charenton. À l’heure présente il n’y a plus à Paris que dix-neuf tireurs de sable. Les déchireurs détruisent, déchirent les bateaux hors de service ; ils ont des ports spéciaux où se fait la mise en pièces : Grenelle, Bercy, la Râpée, Orsay, et encore, dans ces divers emplacements, un endroit particulier sévèrement limité leur est réservé. L’inspection générale a la direction immédiate des ouvriers de l’Entrepôt, dont le nombre ne peut réglementairement dépasser cinquante, et des forts du port aux Fruits (Grèce), qui ne sont que trente en activité pendant la saison des arrivages.

Les ouvriers que je viens de désigner rapidement constituent ce qu’on pourrait appeler l’armée régulière de la Seine ; mais elle à ses enfants perdus, ses aventuriers, qui sont curieux à regarder de près. Il y avait autrefois à Paris des ravageurs qui s’en allaient dans les rues, fouillant le ruisseau avec une latte, déchaussant les pavés et recueillant les clous échappés aux fers des chevaux ; repoussés de la ville, ils se sont réfugiés sur les berges ; comme les orpailleurs de l’Ariége et du Rhin, ils cherchent l’or et l’argent ; mais ils aiment à trouver l’or façonné en monnaie et l’argent sous forme de cuillers. Les ravageurs connaissent parfaitement les endroits où les tombereaux de la municipalité viennent jeter les neiges pendant l’hiver ; c’est là, aux dix-huit emplacements fixés par l’autorité compétente, sur les bords encore couverts par les amas de neige boueuse qu’on a laissés tomber du haut des quais, qu’ils s’établissent avec leur sébile, semblables aux faveurs de pépites du Sacramento, et finissent quelquefois par découvrir au milieu des immondices une piécette blanche, un bijou perdu, un porte-monnaie suffisamment garni. Ces aubaines-là sont, il faut le croire, moins rares qu’on ne