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chers, de nos chevaux et de nos voitures. L’on traite comme vices les effets de notre misère ; l’on regarde comme cris de l’insolence nos gémissemens et les élans de notre désespoir.

Quel sort est le nôtre ! de quelque côté que nous nous tournions, nous sommes les victimes et de ceux que nous payons pour avoir le droit de travailler, et de ceux qui nous payent pour les servir.

Nous allons donner un aperçu des abus et vexations qui résultent de chaque privilége exclusif.

§ 1. — Doléances contre le privilége du sieur Perreau ou représentans.
Avant 1779, chaque carrosse de place payait au propriétaire du privilége, à raison de 21 sols par jour, 385 livres 5 sols par an. Il y avait alors au moins neuf cens fiacres, qui produisaient un revenu de 
 344 925 liv.
Chaque carrosse de remise payait 45 livres 10 sols par an. Il y en avait au moins huit cens, qui produisaient 
 36 400
Ainsi, nous achetions alors la faculté de travailler 
 381 525
Il était prélevé sur cette somme pour l’hôpital 
 10 000
Il restait, pour le revenu annuel du privilége 
 371 525

Le sieur Perreau, sous prétexte que le service ne se faisait pas bien, et promettant de le faire mieux, sollicita et obtint en 1779, par lettres-patentes enregistrées au Parlement, le privilége exclusif des carrosses de place et celui des voitures et messageries des environs de Paris, pour le terme de trente années, moyennant 5 500 000 livres, remboursables à l’expiration du privilége, et à la charge de payer à l’hôpital 15 000 livres, au lieu de 10 000 dont était tenu son prédécesseur. Notre misère devant augmenter par ce traité, il était naturel d’augmenter aussi le droit de l’hôpital à raison de la part que nous y prenons.

Le bénéfice de l’entreprise du sieur Perreau était infaillible ; il était assuré de notre abonnement annuel de 
 381 525 liv.
L’intérêt de ses fonds et le droit de l’hôpital ne montant ensemble qu’à      
 290 000
Il lui restait déjà un profit annuel de 
 91 525


et en outre ses bénéfices sur les voitures et messageries des environs de Paris, que nous ne tirons ici que pour mémoire.

Mais le sieur Perreau, pour rendre sa spéculation plus avantageuse, feignit d’entreprendre seul le service des carrosses de place ; il en fit faire même un grand nombre dans un nouveau goût.

Son projet ne tendait à rien moins qu’à nous ruiner. Car, que faire de nos chevaux et de nos voitures, lorsque la faculté de travailler nous était enlevée ? Les vendre ? Mais qui est-ce qui aurait