Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/56

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permise. Desmarest, dans ses Témoignages historiques, a fait un aveu qu’il est intéressant de rapporter ; lorsqu’il raconte ce que devinrent les principaux auteurs de l’attentat de la rue Saint-Nicaise, il dit, à propos de Limoëlan : « Dévot autant que fier, ne voyant dans son action que la volonté de Dieu, il ne voulut pas se soumettre au jugement des hommes. Il s’embarqua simple matelot à Saint-Malo. Qu’il me suffise de dire qu’il s’est retiré du monde. Son parti ignora ce qu’il était devenu ; mais le gouvernement français ne le perdit pas de vue ; dans le couvent lointain où il a reçu la prêtrise, il ne correspond qu’avec sa sœur, et en tête d’une de ses lettres, dont il craignait sans doute l’interception par les croisières anglaises, j’ai lu cette recommandation remarquable : « O Anglais, laissez passer cette lettre ! elle est d’un homme qui a beaucoup fait et souffert pour votre cause. » J’avais bien soin de ces communications, toutes de piété et de famille. » Napoléon, du reste, ne s’en cachait guère, et il parlait volontiers du cabinet noir, à ses compagnons de captivité, à Sainte-Hélène. « C’est une mauvaise institution, disait-il, qui fait plus de mal que de bien. Il arrive si souvent au souverain d’être de mauvaise humeur, fatigué, influencé par des causes étrangères à l’objet soumis à sa décision, et puis les Français sont si légers, si inconséquents dans leurs correspondances comme dans leurs paroles ! J’employais le plus souvent le cabinet noir à connaître la correspondance intime de mes ministres, de mes chambellans, de mes grands officiers, de Berthier, de Duroc lui-même[1]. » M. de Las Cases est très-explicite, il entre même en quelques détails administratifs qui ne sont point sans intérêt : « Dès que quelqu’un se trouvait couché sur la liste de cette importante surveillance, ses armes, son

  1. Récit de la captivité de l’empereur Napoléon à Sainte-Hélène, par M. le général de Montholon, ch. vii.