Page:Du Camp - Paris, tome 2.djvu/148

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

échantillons, préalablement amollis par une trempée d’eau tiède, sont pétris avec force et longtemps, comme une pâte de pain. C’est ce qu’on nomme la maniotte. Le beurre ainsi foulé devient blanchâtre et prend un aspect crayeux auquel on remédie par l’adjonction d’une teinture mystérieuse que les gens du métier appellent le raucourt, composition dont ils cachent la recette avec soin, et qui n’est autre que le rocou, sorte de matière onctueuse et rouge qui entoure la graine du rocouyer (Bixa ocellana). La plus recherchée vient de Cayenne ; mais comme elle coûte assez cher, on la remplace souvent par un faux rocou composé de carottes et de fleurs de souci.

Les œufs sont enfermés dans de vastes paniers qui en contiennent mille environ, tassés, pressés les uns contre les autres et, par suite d’un emballage habile, parviennent intacts à travers les chocs des chemins de fer, les transbordements et toutes les causes qui devraient pulvériser des objets si fragiles. Dans l’année 1868, 228 097 515 œufs sont arrivés aux Halles et ont été vendus 17 045 013 fr. 14. On les vend à la manne, en raison du nombre indiqué par l’expéditeur ; mais des employés spéciaux, désignés sous le nom explicatif de compteurs-mireurs, sont chargés de vérifier le contenu des paniers et la qualité des œufs. Ces agents, au nombre de quatre-vingts, remplissent une fonction qui ne laisse pas d’être pénible, car il est des saisons où chaque œuf doit être examiné avec soin, par transparence à la lumière, afin qu’un puisse constater qu’il est dans des conditions de salubrité satisfaisantes. Les œufs qui, tachés, trop vieux, opaques, paraissent offrir quelque inconvénient pour la santé publique, sont livrés à l’industrie, qui les utilise, pour la dorure sur bois et pour la confection des colifichets destinés aux oiseaux. Les œufs tout à fait gâtés sont immédiatement détruits. C’est dans les resserres