Page:Du Camp - Paris, tome 2.djvu/214

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nervures trop saillantes, ni déchirures, qui, en un mot, sont exempts de toute avarie, sont roulés ensemble les uns par-dessus les autres, à l’aide d’une machine composée de deux rouleaux mis en mouvement par un drap sans fin qui, saisissant la feuille, la fixe à un mandrin de bois. Ce mandrin, semblable à un gros bâton de sucre de pomme, conserve ainsi les feuilles réservées à la robe des cigares ; mais la préparation de la tripe présentait une difficulté qu’il a fallu résoudre.

Il n’est pas douteux que le climat de la Havane, à la fois chaud et humide, n’ait une influence considérable sur le tabac et ne lui communique des qualités particulières. On a donc cherché à placer les feuilles destinées aux intérieurs de cigares dans un milieu analogue, autant que possible, à celui qu’elles auraient eu à Cuba. On les enferme dans une salle où elles sont disposées dans des armoires ; chaque tas séparé, posé sur un tiroir à claire-voie, est muni d’un thermomètre. La température est invariablement fixée de 25 à 30 degrés ; de plus, un jet de vapeur, qu’on modère à volonté, donne la quantité précise d’humidité nécessaire. Il faut une lampe pour se diriger dans cette chambre, tant l’obscurité y est profonde, car on a reconnu que la lumière du jour était nuisible au tabac, et que celle du soleil lui était mortelle. Quand cette sorte de fermentation havanaise est accomplie, les feuilles sont séchées et livrées, selon les besoins du service, aux ateliers de consommation.

Lorsque l’on entre dans ces derniers, deux cents femmes tournent la tête, chuchotent, et, sous le regard du contre-maître, se remettent vite à la besogne. Chaque ouvrière a devant elle un rouleau, des débris de tabac, un petit pot de colle, un tranchet en forme de roue et une plaque de zinc trouée dont l’ouverture représente la forme exacte que le cigare doit avoir ; ce dernier outil