Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’une décomposition menaçante, et qu’on fit comparaître. Tous les supplices étaient précédés de l’amende honorable : le condamné, à genoux, pieds nus, corde au cou, tenant en main une torche en cire d’un poids déterminé par le jugement, demandait, devant une église désignée, pardon de ses crimes à Dieu, cérémonie à la fois humiliante et théâtrale, qui était une aggravation de la peine. Le dernier malheureux qui fit amende honorable fut Mahi de Favras, le fameux complice de Monsieur, le 19 février 1790. Une telle brutalité dans la répression indignait-elle les hommes d’intelligence ? — Tant s’en faut ! Collé raconte dans ses Mémoires qu’il a vu une entremetteuse promenée dans les rues de Paris, fouettée et marquée, et il s’étonne qu’elle n’ait point été condamnée à mort.

Si telle était la justice du parlement et du roi, on peut imaginer ce que valaient ces justices seigneuriales, prévôtales, ecclésiastiques, qui pendant tant d’années s’exercèrent sans contrôle, comme un droit supérieur transmis par la naissance, la charge exercée ou la tradition. Ce fut Louis XIV qui hardiment poussa du pied toutes les petites potences qui se dressaient autour de celle de la royauté ; il ne voulut plus à Paris qu’une seule loi, la sienne, et, sans le prévoir, obéissant à un idéal de grandeur monarchique, il rendit plus faciles les réformes qui devaient atteindre la justice française et en préparer l’unité[1]. Lorsque l’édit de 1674 supprima

    somme deux ou trois personnes à coups de pilon de fer et se tue ensuite lui-même en s’ouvrant la gorge. — 23 janvier : Nous apprîmes de plus que le corps de Deck avait été salé et qu’on le gardait pour faire justice exemplaire et le traîner par la ville, au cas qu’il soit bien avéré qu’il se soit tué lui-même, comme il n’en faut point douter. — 30 janvier : Ce mesme jour il fut donné arrest au Châtelet, par lequel il fut ordonné que le corps de Deck serait traîné par la ville, pour estre ensuite attasché au gibet. » Villiers, Voyage à Paris, p. 290 et passim.

  1. Nul doute que Louis XIV n’eût voulu agir ainsi pour toute la France ; mais pendant la guerre qui suivit la paix de Ryswick, il avait vendu les justices de la plupart de ses domaines. Dès lors il ne pouvait les suppri-