Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/154

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bunal ordinaire, et ainsi nommée parce que les conseillers au parlement y faisaient le service à tour de rôle. Les affaires correctionnelles étaient confiées au Châtelet et jugées sous la présidence du prévôt de Paris. C’est là qu’on expédiait, comme aujourd’hui dans les sixième et septième chambres, les menus délits commis par le peuple parisien : escroqueries, mendicité, vagabondage, injures. Les salles du Châtelet ne chômaient guère, pas plus que ne chôme notre police correctionnelle.

M. Ch. Desmaze, conseiller à la cour impériale, possède un très-curieux tableau du temps de Louis XV représentant une audience au Châtelet, et qu’il a bien voulu me permettre d’étudier. Sous un dais, qui est un attribut royal, le prévôt siège en robe noire, en rabat blanc, en longue perruque poudrée. Le banc sur lequel il est assis, le dais qui l’abrite, sont en étoffe bleue à fleurs de lis d’or. Un christ est placé au-dessus du principal personnage, avec lequel un magistrat, qui n’est autre que son lieutenant, semble se consulter. À la gauche se tiennent quelques seigneurs, occupant des places privilégiées, et qui sans doute sont venus voir comment on administre la justice au bon peuple de Paris. À droite, le procureur du roi parle et requiert l’application de quelque caduque ordonnance. C’est là le fond du tableau, le tribunal proprement dit, qui est élevé sur une estrade de quelques marches. Plus bas, de plain-pied avec la foule des assistants, s’étend une large table sur laquelle deux greffiers écrivent. Là, séparés du public par une barrière à hauteur d’appui, s’entassent les prévenus gardés par quelques soldats de la maréchaussée : ce sont des filles, des cagoux, des riffodés, des mendiants, de faux pèlerins portant la coquille à l’épaule, de petits laquais à mine de chafouin, des béquillards vêtus de guenilles, tourbe ra-