Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/215

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est plus aujourd’hui à discuter de telles hérésies, mais il ne faut pas croire qu’elles n’ont point laissé quelques traces, encore trop visibles, dans nos institutions. L’État, par un esprit d’économie qui, dans l’espèce, parait excessif, cherche à se décharger en partie des frais qu’entraîne inévitablement l’entretien des maisons de force et de correction. Pour arriver à ce résultat, il tire un certain profit du travail qui est uniformément imposé à tous les détenus condamnés[1].

À cet effet, le travail n’est concédé à des entrepreneurs que sous certaines conditions : le genre des industries auxquelles les détenus doivent travailler est soumis à l’examen et à l’approbation du préfet ; le salaire n’est accepté et réglé qu’après avis donné par les chambres de commerce ; le concessionnaire est tenu de remplir plusieurs charges, qui ne manquent point d’être onéreuses, telles, entre autres, le chauffage et les vidanges de la prison ; mais il reçoit la moitié du salaire gagné par le détenu ouvrier, de sorte que c’est celui-ci qui paye, d’une façon détournée, une partie de l’entretien de la maison. La règle est absolue, et, si quelque prisonnier privilégié obtient de ne pas être astreint au labeur imposé, il se rachète en payant 25 centimes par jour à l’entrepreneur. Par le fait, un détenu qui gagne un franc ne touche que 50 centimes, dont une moitié lui est remise comme denier de poche, et dont l’autre, le denier de pécule, est accumulée pour former une masse, qui lui sera donnée au moment de sa libération.

La nourriture du moins n’est point disputée aux pri-

  1. C’est à partir de 1817 que le travail des détenus fut compris dans les traités d’entreprise générale ; en 1842, l’État a pris les maisons de détention en régie ; un décret du 24 mars 1848 a aboli le travail dans les prisons, sous le prétexte fort discutable qu’il portait atteinte au travail libre ; une loi du 9 juillet 1849 l’a rétabli avec des restrictions qui disparurent après le décret du 25 février 1852 ; en 1856, la régie fit de nouveau place aux entreprises et n’a été conservée qu’à la maison centrale de Clairvaux, afin de poursuivre une expérience commencée.