Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/35

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rade on au radin se fait le soir, vers onze heures, à l’instant qui précède la fermeture des volets. Au moment où les garçons, occupés à ranger les marchandises, ont le dos tourné, où le patron, debout dans un coin, vérifie son livre de caisse, un gamin se glisse sous le comptoir, sans être aperçu, détache prudemment la rade, c’est-à-dire le tiroir qui contient la recette de la journée, profite d’une minute opportune pour s’échapper et remettre son butin à un complice qui l’attend en regardant la devanture.

Les pertes que fait éprouver ce genre de vol ne sont jamais bien considérables ; mais le vol à la vrille a souvent des résultats désastreux, car lorsqu’il est bien mené, par des gens à la fois prudents et adroits, il permet de dévaliser complètement un magasin. Sous prétexte d’achats, un voleur entre, pendant le jour, dans la boutique ; il en examine avec soin la topographie, il regarde où est située la caisse, où sont les marchandises riches, s’il n’y a pas de sonnettes correspondant de la porte d’entrée à l’appartement du patron ; puis, la nuit close, à cette heure où les Parisiens dorment, où les voitures de place sont remisées, où les rues sont désertes, où le gaz donne une clarté propice, il revient avec des compagnons. Dans le volet souvent doublé en fer, on perce à l’aide d’un vilebrequin une série de trous serrés les uns contre les autres, qui permettent d’enlever une plaque circulaire assez large pour laisser pénétrer un enfant, et juste en face de la serrure, qui est promptement crochetée. Par l’ouverture, on fait glisser un raton, gamin alerte et mince, choisi pour la circonstance. D’après les indications qui lui ont été minutieusement répétées, il s’empare des marchandises et les passe à ses complices. Parfois, lorsque les objets à voler offrent un certain volume, le raton, une fois dans l’intérieur, ouvre la porte toute grande, fait sauter les cla-