Page:Du Camp - Paris, tome 4.djvu/17

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un magasin de vitraux d’église. L’emplacement est assez vaste et sert de remise à des tonneaux de porteurs d’eau ; la place se dégorge dans un petit passage d’aspect misérable, qui aboutit lui-même à l’impasse de l’Étoile, voie biscornue s’embranchant sur la rue Thévenot. C’est là un des restes du vieux Paris ; mais on en trouve de plus curieux lorsque, ayant franchi la rue des Forges, rue en retour d’équerre ouverte sans souci d’aucun alignement, à la suite d’une décision du 2 messidor an VIII, traversé la rue de Damiette, où les ouvriers travaillent dans des caves, circulé dans les méandres du passage du Caire, on arrive rue des Filles-Dieu et devant l’impasse de la Grosse-Tête, qui porte ce nom depuis 1341 ; là, à voir la saleté du sol, les ruisseaux qui passent au milieu de la voie sans trottoir, les masures hantées par ce que la débauche a de moins dissimulé, on se croirait dans le Paris du quinzième siècle, et l’on comprend tout ce qui reste à faire encore pour assainir la capitale inachevée que nous habitons.

De nos jours même les mendiants ont eu une sorte de refuge qui rappelait ceux où ils se plaisaient autrefois : c’était l’enclos de Saint-Jean-de-Latran. Bien souvent je l’ai traversé jadis, lorsque j’étais conduit en promenade avec mes camarades de collège ; je me souviens encore de l’odeur nauséabonde qui sortait des bouges sordides contre lesquels nous passions ; aux fenêtres on ne voyait que des loques ; les habitants de ces tanières semblaient des échappés des grandes truanderies du moyen âge ; l’emplacement, des plus irréguliers, était formé de deux cours en losange accolées par un des angles ; dans un coin s’élevait une sorte de tour carrée, reste d’une commanderie de Malte, le long de laquelle les ravenelles fleurissaient au printemps, et que Bichat avait habitée. S’ouvrant sur la place Cambrai, en face du Collège de France, c’était une sentine où le soir ve-