Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/148

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Paris ; il fallut la Révolution pour le détruire ; les sourds muets leur succédèrent.

L’institution, prenant façade sur la rue Saint-Jacques, forme un quadrilatère qui s’appuie sur les jardins de l’ancien hôtel de Chaulnes, sur la rue d’Enfer et sur la rue de l’Abbé-de-l’Épée, qu’on appelait autrefois la rue des Deux-Églises ; elle est isolée de l’ancienne chapelle des frères hospitaliers qui, après avoir été érigée en succursale des paroisses du quartier par sentence de l’official de Paris datée de 1566, fut reconstruite de 1630 à 1688 ; on a ainsi employé un demi-siècle à faire un des plus laids monuments extérieurs qui se puissent imaginer.

Après avoir franchi la porte de l’institution, on se trouve dans une vaste cour où s’élève un arbre célèbre, le fameux ormeau que l’on voit de tout Paris, et qu’on a surnommé « le panache de la montagne Sainte-Geneviève ». Sa tige file droit à une hauteur de cinquante mètres et est couronnée d’une touffe de verdure en forme de bouquet. Il a sa légende : on prétend que Sully lui-même l’a planté en venant un jour faire ses dévotions à Saint-Magloire ; cette historiette n’est rien moins que certaine, mais la tradition qui le fait remonter à 1600 n’est pas dénuée de vraisemblance. On est étonné, non pas en admirant cet arbre géant, non pas en regardant les constructions, qui ont un caractère vague d’hospice, de caserne, de collége ou de couvent, mais en n’apercevant pas là, à la place d’honneur, au seuil de cette institution, qui est un sujet d’orgueil pour l’humanité entière, au sommet de cette colline que le moyen âge appelait Mons scolarum, devant la maison où l’on renouvelle chaque jour le plus grand miracle que l’enseignement ait jamais pu faire, on est étonné de chercher en vain une statue de l’abbé de l’Épée. La surprise est pénible, presque douloureuse, surtout lorsque l’on se rap-