Page:Du Camp - Paris, tome 5.djvu/202

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piquant les signes conventionnels avec une grande régularité, silencieux, très-attentifs et ayant vraiment l’air de faire effort pour déchirer la nuit qui les enveloppe. Ils lisent sans ânonner, lestement, l’extrémité des doigts sur les points saillants et aussi rapidement qu’un voyant qui lirait à haute voix. Ils ont d’eux-mêmes abrégé leur écriture ; à moins qu’ils ne fassent un devoir de grammaire, ils négligent l’orthographe, qui n’est utile que pour les yeux, et ils se servent d’une sorte de sténographie exclusivement phonétique : ils ne reproduisent que le son. Ainsi, au lieu d’écrire lentement et en détail : j’ai bu de l’eau, — ce qui exige 27 coups de poinçon, — ils écrivent en 17 points : j bu dlo. Ils vont ainsi beaucoup plus vite et avec une sûreté égale, car le système graphique de Louis Braille, qui actuellement est adopté dans le monde entier, excepté par l’Allemagne du Nord, a cela d’admirable qu’il se prête à toutes les abréviations possibles et qu’il correspond à la fois aux besoins de la vue, de l’ouïe et du toucher.

Lorsque les enfants parviennent à la seizième année et que déjà ils ont des notions sérieuses de grammaire, de littérature, de géographie et d’histoire, on les laisse très habilement livrés à eux-mêmes pour le choix des compositions qu’ils ont à faire. Au lieu de leur donner une matière à amplifier, discours ou narration, on leur dit à peu près : Faites ce que vous voudrez. C’est un moyen excellent de leur permettre de développer eux-mêmes leurs facultés dominantes et de lire plus facilement dans ces âmes qui semblent toujours redouter d’être pénétrées. Le devoir est généralement indiqué de cette façon vague : une lettre à écrire. Quelques-uns choisissent un sujet de morale, mais alors ce n’est guère qu’une réminiscence des sermons entendus à la chapelle ou des lectures écoutées à la classe. D’autres racontent des aventures de voyage, des naufrages, des