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— La liberté. — Si le mouvement laïque s’accentue, les congréganistes en profiteront.


Dans un mémoire que l’Académie des Sciences morales et politiques jugea digne d’une mention honorable[1], M. Cochin a écrit, à propos de l’enseignement, cette phrase d’une vérité aussi douloureuse que saisissante : « C’est chose désolante qu’en ce grave sujet il reste si peu à dire, mais tant à faire. » — Que penserait-il donc aujourd’hui que cette grave question, servant d’arme aux partis politiques, passionne les esprits qu’elle aveugle et fait naître toute sorte de solutions qui la compliquent, la paralysent et menacent d’en faire un problème indéchiffrable ? C’est cependant la question vitale par excellence, celle devant laquelle toute préoccupation aurait dû se taire, qu’il fallait aborder d’une façon abstraite, qui n’exigeait pas moins que le concours de toutes les intelligences, et qu’on aurait dû résoudre tout d’abord, car d’elle dépend l’avenir de notre pays.

De ce chaos d’opinions se heurtant avec une véhémence qui rappelle les disputes d’où naquirent les guerres de religion, que sortira-t-il ? — L’instruction obligatoire, sans nul doute, dont la nécessité finira par s’imposer même aux préventions les plus récalcitrantes ; mais sur ce terrain, qui devrait être celui de la concorde universelle, il est à craindre de voir surgir des luttes stérilisantes et désastreuses : — Obligatoire et gratuite, — obligatoire seulement, — moralement obligatoire, — obligatoire et laïque, — obligatoire et cléricale. — C’est la tour de Babel ; on ne sait quelles voix écouter ; ceux qui parlent semblent ne pas se comprendre, car dans toutes ces batailles où la logomachie

  1. Essai sur la vie, les méthodes d’instruction et d’éducation et les établissements d’Henry Pestalozzi, par Augustin Cochin. — Paris, août 1848. Brochure de 88 pages.