Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/132

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Lutèce vers les provinces du Nord. Ce fut Philippe-Auguste qui en 1186 le fit enclore de murs ; auparavant c’était un lieu vague, chacun y passait, et, à certains jours de l’année, on y vendait des chevaux. Une église dédiée aux saints Innocents fut édifiée, et peu après on éleva autour du cimetière des arcades supportant des greniers, — des galetas, c’était le mot, — qui servirent de charnier, c’est-à-dire d’ossuaire. On tenait à honneur d’augmenter et d’embellir le cimetière parisien par excellence ; c’était là œuvre pie qui appelait l’indulgence de Dieu. Nicolas Flamel y fit construire deux arcades, l’une en 1389, l’autre en 1404.

Guillebert de Metz, qui visita Paris sous Charles VI, dit : « Illec sont painctures notables de la danse macabre et aultres, avec escriptures pour esmouvoir les gens à dévotion. » Par le Journal d’un Bourgeois de Paris, on sait exactement à quelle époque furent faites ces compositions à la fois naïves et terribles, dont il restait trace encore à la fin du dix-septième siècle : commencées en août 1424, elles furent terminées pendant le carême de l’année suivante. Il y avait là une logette où l’on emmurait certains coupables, qui n’avaient plus pour subsister que l’aumône des passants ; la porte, solide et armée de fer, s’ouvrait à deux clefs, dont l’une était gardée par le marguillier de l’église des Saints-Innocents, et l’autre déposée au greffe du parlement ; c’est là qu’en 1485 fut enclose à toujours Renée de Vendomois, qui avait assassiné son mari.

Les caveaux de l’église étaient si pleins de cadavres que, dès le seizième siècle, il n’était pas rare de voir des cercueils rangés le long des murs et attendant qu’on eût trouvé place pour les caser ; dans le cimetière s’élevaient quelques sépultures particulières ; mais le mode d’inhumation pour les simples particuliers était atroce : on creusait de grandes fosses dans lesquelles on enfouis-