Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/309

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La puérilité du Parisien l’entraîne à des actions semblables dont le côté révoltant lui échappe ; elle l’empêche aussi de tenir une ligne de conduite réfléchie ; il est tout à la première impression ; il s’éprend de ce qu’il n’a pas, se dégoûte de ce qu’il a et regrette ce qu’il n’a plus. Très-crédule, se payant de mots, ne voyant les choses que par la surface avec laquelle il est en contact, il gobe toutes les bourdes qu’on lui débite, d’autant plus facilement qu’il est fort ignorant, oublie vite et n’apprend rien. Les rhéteurs, qu’il a souvent le tort d’écouter, abusent de cette naïveté un peu niaise et lui jettent en pâture des mots « qui ont déjà servi ». On s’est grisé avec la parole imprudente de M. Jules Favre : « Pas une pierre de nos forteresses, pas un pouce de notre territoire ; » elle est empruntée au serment des Templiers. — M. Rochefort croit avoir inventé le « gouvernement de la Défense nationale » ; l’expression est de Michelet, et il l’applique à la faction des d’Armagnacs. — M. Gambetta s’écrie qu’il a fait un pacte avec la victoire ou avec la mort ; c’est la double riposte de Mercier et de Bazire. — Il n’est pas jusqu’à M. Glais-Bizoin, aphone et branlant le chef, qui, visitant le camp de Conlie, n’ait mis ses mains derrière le dos pour dire aux troupes assemblées : « Soldats ! je suis content de vous ! » — Après le 18 mars, M. Favre demandait pardon à Dieu et aux hommes de n’avoir pas fait désarmer la garde nationale ; longtemps avant lui, Danton avait dit cela en parlant du tribunal révolutionnaire. Pendant le siège, pendant la Commune, les braillards débraillés ont-ils assez crié : vaincre ou mourir ! C’était la devise de Henri IV, le mot d’ordre qu’il donnait à Arques.

Toutes ces défroques des rhétoriques surannées, le Parisien les accepte sans sourciller, et parfois même pousse la bonne foi jusqu’à les trouver éloquentes. Phrases toutes faites, idées reçues, lieux communs, méta-