Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/327

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui gagne moins, parce qu’il donne tout à son ventre et à ses habits. »

Cette vanité du vêtement, ce besoin de clinquant et de galons qui tourmentent le Parisien, apparaissent surtout dans les moments de troubles. Chacun rêve de porter un panache ; l’égalité réclamée se manifeste alors par les broderies dont on se charge. Que n’a-t-on pas vu pendant le siège et la Commune ! Ce fut une débauche d’uniformes plus brillants les uns que les autres. Les officiers de Dombrowski et de Bergeret, qui ballottaient sur leurs chevaux à travers la chaussée des boulevards, faisaient honneur à l’imagination des costumiers : ceintures, brassards, hongroises soutachées, ruban d’ordonnance rappelant celui de la Légion d’honneur, rien n’y manquait ; les chabraques à passepoils dorés enveloppaient les selles. En les voyant passer, on se souvenait involontairement de la phrase écrite par Camille Desmoulins dès le mois d’août 1789 : « On ne rencontre dans les rues que dragonnes et graines d’épinards. » Les femmes ne nous ont point épargné d’écœurants spectacles ; elles suivaient ou précédaient les bataillons de fédérés dans des jaquettes ridicules où les ornements n’étaient point ménagés. Ces viragos descendaient des tricoteuses et de Théroigne de Méricourt. La femme d’un colonel se promène ici avec bonnet rouge, dit un témoin de la Révolution, avec des pistolets à la ceinture, et se vante publiquement du nombre de gens qu’elle a tués lors des massacres d’août et de septembre. » La Commune permit aux locataires de déménager sans payer les termes échus, et nul ne s’en fit faute ; c’est une mesure analogue qui, pendant la Ligue, avait valu une sérieuse popularité au conseil de l’Union.

Notre histoire contemporaine, j’entends celle qui commence en 1830 et se prolonge jusqu’à nos jours,