Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/99

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C’est un samedi qu’il faut aller à la mairie lorsque l’on veut suivre les faciles péripéties d’un mariage ; ce jour-là, que les gens du monde ne choisissent jamais, semble réservé spécialement à la classe qui travaille, vit de son labeur et n’a point de temps à perdre ; on a le dimanche pour « faire la noce », — le mot n’est que trop souvent exact dans toute son acception, — et le lundi on se remet à la besogne. Vers onze heures généralement, les fiancés, leurs parents, leurs témoins, sont réunis ; on a amené les enfants de la famille vêtus de neuf, frisés, pommadés, débarbouillés pour la circonstance. Les garçons de noce sont flambants, les mariées sont dévisagées par tous les assistants ; elles essayent de prendre un air modeste et n’y réussissent pas toujours.

M. le maire ou l’adjoint est prévenu ; il met en sautoir l’écharpe tricolore qui, aux yeux du vulgaire profane, lui confère seule le pouvoir de prononcer les paroles sacramentelles dont nulle puissance humaine n’a le droit de briser l’effet, il prend à la main un petit livre relié en maroquin rouge, il donne un coup d’œil à la glace pour s’assurer que sa cravate ne fait pas de faux plis, et il se dirige vers le prétoire, où une estrade de deux marches soutenant un bureau d’acajou représente le tribunal des unions indissolubles. Un domestique faisant fonction d’huissier l’annonce ; il entre ; tout le monde se lève ; il s’assoit, tout le monde en fait autant. Quelle que soit la saison, quelque froid qu’il fasse, les portes de la salle restent ouvertes à deux battants, car l’acte du mariage est essentiellement public.

Cependant un greffier s’est assis devant un pupitre chargé d’un gros registre qui ressemble de loin à un « grand-livre » de commerce ; on appelle un nom ; un certain nombre de personnes s’avancent vers l’estrade ; voici les fiancés, les parents, les témoins ; ils s’instal-