Page:Du Camp - Théophile Gautier, 1907.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
56
THÉOPHILE GAUTIER.

critiques « autorisés » soutenaient encore au temps de la jeunesse de Gautier, alors qu’il était de mauvaise compagnie de ne pas mettre au rancart les poètes antérieurs à Malherbe, que l’Art poétique de Boileau avait vilipendés. Gautier a sans doute subi l’influence des idées ambiantes, qui pourtant n’étaient pas les siennes. Si, malgré leur verve, Georges de Scudéry et Cyrano de Bergerac sont désagréables par leur attitude de matamores de plume et d’épée, si Chapelain est lourd et rocailleux, si Guillaume Colletet est fadasse, si Saint-Amant force trop la note comique, François Villon, Théophile de Viau sont des poètes avec lesquels l’histoire littéraire doit compter, et Scarron pousse parfois la scurrilité jusqu’à une vigueur de burlesque inconnue avant lui ; je ne vois que Scalion de Virbluneau et Pierre de Saint-Louis qui soient absolument grotesques et dignes de l’épithète qui aurait dû être épargnée aux autres. Le choix de ce titre étonne de la part de Gautier, qui plus d’une fois a dit : « Il faut déjà bien du talent pour écrire un livre médiocre ou peindre un mauvais tableau. »

Au début de l’étude consacrée à François Villon, il ne dissimule cependant pas ses préférences, tout en semblant s’excuser d’y obéir : « Ce n’est guère, dit-il, que dans le fumier que se trouvent les perles, témoin Ennius. Pour moi, je préférerais les perles du vieux Romain à tout l’or de Virgile ; il faut un bien gros tas d’or pour valoir une petite poignée de perles. Je trouve un singulier plaisir à déterrer un