Ceci dit, il cite la scène du Pédant joué dont il est incontestable que Molière s’est inspiré pour écrire la scène des Fourberies de Scapin. En les comparant l’une à l’autre, on peut constater ce qu’une idée comique trouvée par un homme d’esprit devient sous la plume d’un homme de génie. Donc Théophile Gautier a raison : la scène est immortelle, non point parce qu’elle est inventée par Cyrano de Bergerac, mais parce qu’elle a été arrangée, développée et mise en vraie place par Molière. La donnée est la même, la phrase essentielle, si souvent répétée : « Qu’allait-il faire dans cette galère ? » est la même ; mais, en vérité, les deux scènes ne se ressemblent pas plus que le Pédant joué ne ressemble aux Fourberies de Scapin.
Molière ramasse une idée dans le fatras de Cyrano de Bergerac et en tire un chef-d’œuvre ; Scarron prend une légende passée à l’état de fable, et en fait une farce. Le vague souvenir d’une sorte de Jacquerie préhistorique, transmis de génération en génération, demeure une tradition orale, jusqu’au jour où Hésiode le recueille et lui donne l’immortalité dans sa Théogonie, dont Evhémère a dû sourire. Plus tard, lorsque la langue latine est déjà décadente, Claudien sera tenté par ce sujet et lui consacrera son poème de la Gigantomachie, dont il ne reste que quelques fragments. À son tour Paul Scarron s’empare de la guerre des géants, et avec son esprit aussi biscornu que sa personne, en compose, sous le titre de Typhon, une pantalonnade digne des tréteaux de la foire, d’où