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THÉOPHILE GAUTIER.

Je me permettrai néanmoins une seule observation : Lamartine a composé le Lac en 1817, à Aix-les-Bains, deux années avant la mise au jour du volume contenant les vers d’André Chénier, par conséquent en dehors de toute l’influence qu’ils auraient pu exercer sur son inspiration et sur son talent.

Après un rapide coup d’œil jeté sur les origines de la poésie dont la floraison s’épanouit après la convulsion de février 1848, Théophile Gautier aborde l’époque spéciale où il doit se limiter, et cite, avec juste appréciation, les auteurs qui l’ont honorée. Constatant leur mérite individuel, il en fait remonter la source aux grands fleuves dont leurs ascendants du romantisme ont fécondé les champs épuisés où la poésie française ne trouvait plus à récolter que des fruits sans saveur et des fleurs sans parfum. Ce n’est pas un reproche qu’il leur adresse, car, dit-il, « l’originalité n’est que la note personnelle ajoutée au fonds commun préparé par les contemporains ou les prédécesseurs immédiats ». Ces poètes, presque tous de la génération à laquelle j’appartiens et qui étaient encore dans la première jeunesse, au moment où la monarchie de Juillet s’écroula, ces derniers venus de l’école de 1830 déjà tenue en échec par l’école dite du bon sens, ces adorateurs de la Muse moderne qui ne juraient que par Hugo, par Byron, par Goethe, par Alfred de Musset, je les ai connus pour la plupart, aimés, admirés, lorsqu’ils débutaient dans la vie, pleins d’illusions et brillants d’espoirs qui n’ont pas toujours été réalisés. Plus d’un s’en