le sujet de la conversation, si tant est qu’elle daigne m’écouter ; car je crois que je lui paraîtrai fort sotte.
Adieu, ma reine ; vous devez être excédée de mon rabâchage ; mais je trouve qu’il arrive fort à propos. Lisez ma lettre le soir, à coup sûr elle vous servira d’opium ; mais, par grâce, ne vous endormez pas à la fin, ou du moins promettez-moi de lire les dernières lignes : à votre réveil, je veux que vous sachiez que je vous aime, que je vous en assure, et que vous devez compter sur moi comme sur vous-même que ne suis-je à portée de vous en donner des preuves !
Ma sœur me charge de vous faire mille compliments et amitiés nous parlons souvent de vous. Faites mention de moi en Bretagne[1].
Je suis persuadée, madame, que vous prenez part à ce qui me regarde : ainsi il ne me fallait pas d’excuse d’avoir tardé à me faire votre compliment sur la perte que je viens de faire[2]. Je me doutais bien que vous n’en saviez rien ; je compte trop sur votre amitié, pour douter un moment que vous êtes capable de m’oublier, et, à vous parler franchement, je n’imagine jamais ce qui peut me faire de la peine : c’en serait une véritable pour moi, si je pouvais prévoir que vous fussiez un moment sans m’aimer. Sans fadeur, je vous trouve si aimable et si fort à mon gré, passez-moi ce terme, que je serais furieuse si vous étiez assez mal née pour n’avoir pas pour moi un peu de bonté ; car, en vérité, vous avez peu de gens qui vous soient aussi tendrement attachés : je le disputerais quasi à madame de Rochefort, à qui je vous prie de faire mille compliments. Je ne vous en ferai point à vous en finissant ma lettre : je vous dirai tout crûment que je vous aime et que je vous embrasse de tout mon cœur.