Page:Du Flot - Les mœurs du tigre, récit de chasse, 1886.djvu/39

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Mais, chose singulière, à proportion que les empreintes du fauve se faisaient plus distinctes et plus profondes, l’herbe était de moins en moins foulée. Le tigre n’avait donc pas traîné sa victime pendant ce long parcours. Il l’avait littéralement portée sur ses robustes épaules.

Quelques jours plus tard, le monstre renouvela son exploit en plein jour, devant une dizaine de témoins. Il fut donc impossible de conserver l’ombre d’un doute à cet égard. On put voir le gigantesque félin jeter la vache sur son dos, se bornant à laisser traîner les cornes sur le sol, et bondir sous cette masse pesante avec une légèreté presque égale à celle qu’il aurait déployée dans toute la liberté de ses mouvements.

Toutes les tentatives pour l’attirer dans un piège, pour le surprendre à l’affût demeurèrent infructueuses. On avait affaire à un vieux routier, malin comme un singe, et qui prisait plus l’habileté que la force. « Ce tigre là — me disait M. de F… — avait dû entendre siffler bien des balles à ses oreilles. » Il ne se hasardait point, sachant que