Page:Du Flot - Les mœurs du tigre, récit de chasse, 1886.djvu/46

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est bien parvenu à dompter d’autres félins qui peuvent être considérés comme ses cousins germains. On a dressé des léopards et des panthères, et il y a même des hordes du Kurdistan qui possèdent une espèce de léopards qu’ils élèvent pour la chasse à courre, comme le chien et le faucon, et que l’on nomme guépards.

Je reviens aux anecdotes. C’est, en effet, par les exemples seuls que l’on peut procéder en ces matières.

En 1846, je fis la connaissance d’un vieil officier anglais qui avait fait toutes les guerres de l’Empire. Il avait alors soixante ans et était major dans l’armée de la compagnie. C’était un hypocondriaque assez misanthrope, et qui, pour compagnie, préférait, cela va sans dire, les bêtes aux hommes. Il vivait entouré de singes, de chiens et de perroquets. Mais l’hôte le plus curieux et le moins rassurant de son logis était un superbe tigre adulte, dont il voulut bien me faire l’histoire.

— Il y a quatre ans — me dit-il — dans une chasse, je tuai, du premier coup de fusil, une tigresse, dans les forêts du Bundelcund. La pauvre bête nourrissait trois petits. Deux d’entre eux étaient déjà des gaillards forts éveillés, dont mes gens s’emparèrent, et qu’ils vendirent à des montreurs d’animaux en cages. Le troisième, beaucoup moins bien venu que ses frères, ne paraissait pas destiné à vivre longtemps. Mû par un sentiment de pitié, j’adoptai l’orphelin, et j’essayai de réparer envers lui le mal