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LA GROTTE DE ROCH-TOUL


chanter sous l’autel. Fina se vit dans l’obligation d’écouter les propos du compère et de lui parler bellement, afin d’en tirer quelque chose.

Barbe-rouge lui apprit qu’Alanik s’était perdu dans la caverne, parce qu’il n’avait pas emporté un certain collier magique. Ce collier, fait d’argent et de perles fines, était en la possession du singe, mais il avait juré par les cornes du diable de ne le donner qu’à celle qui consentirait à l’épouser, lui, Barbe-rouge.

Fina sentit, au premier moment de sa fureur, une grande envie d’étrangler le misérable ; mais nous savons qu’elle avait de la ruse dans sa cervelle de femme ; aussi s’apaisa-t-elle tout à coup, et lui répondit-elle de sa plus douce voix d’oiseau trompeur :

— Ma foi, Barbe-rouge, tu es bien laid, je l’avoue, mais tu as tant d’esprit, que je serai ta femme si tu m’aides à trouver le trésor de Roch-Toul.

— Le trésor, dit l’autre, nous le trouverons, belle fille, et je mettrai un louis d’or sur chacun de tes yeux bleus, sur ta bouche de rose aussi, et des piles, des piles dans tes mains et à tes pieds !

— C’est charmant, reprit Fina en riant, et moi, je t’appellerai Barbe-d’or… Ah ! ah ! ah !…

Elle s’en donna de rire, malgré sa colère, et le tailleur passa plus d’une heure avec elle, l’idiot, à se griser de vin et de faux amour. Le méchant dupeur, dupé à son tour, ressemblait en cela à tant de gens de ce monde, qui, même au moment de se marier, jouent (ô malheur !) jouent au fin et se trompent mutuellement.