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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/110

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FANTÔMES BRETONS


et vous en saurez là-dessus tout autant que moi, sonneur de Logona.

Or, notre Roitelet avait encore en plus toute une nichée d’enfants : deux garçons et une demi-douzaine de filles. Seigneur Dieu, le pauvre homme !… C’était en vérité un joli compte. Et quand on pense qu’il fallait nourrir tout cela, et doter peut-être six filles avec deux ou trois poires ; ah ! il y a bien de quoi faire frémir un père de famille !

N’importe, le Roi aux Poires ne frémissait pas, surtout en l’année cherche bien, époque où il régnait, comme vous savez, si vous connaissez l’histoire. Il se trouvait même fort à l’aise, car, en cette année de grâce-là, le bon Dieu lui avait permis pour la première fois, depuis trente ans peut-être, de récolter un morceau d’une poire tombée à terre, on ne sait comment. Oui, il nourrissait toute sa maisonnée avec son morceau de poire. Cela semble vous étonner, c’est bien vrai pourtant, car, nous autres conteurs bretons, nous disons toujours la vérité.

Écoutez bien : en juillet, les poires, grosses comme des melons, étaient d’argent, mais en août, elles ressemblaient à des citrouilles et elles étaient d’or !

Le tout était de les cueillir à point : or notre pauvre Roi n’y arrivait jamais. S’il avait su se contenter de ses poires d’argent, nul doute qu’il n’y fût parvenu ; mais l’avarice et l’ambition, ces deux lèpres du monde, le poussaient toujours à reculer.

En regardant ses poires d’argent, il se disait : Encore