Aller au contenu

Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/181

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

185
LE RECTEUR DE L’ÎLE DE HOUAT


ture, sans omettre de parler du fanal, puis d’un coup de sifflet venant du large et d’un bruit d’avirons qu’elle avait cru entendre au commencement de sa fuite. M. Pol comprit que Corfmat n’était point venu sur cette falaise écartée pour surprendre la femme de Julien, mais bien dans le but de tramer avec des inconnus, des ennemis sans doute, quelque complot, quelque nouvelle perfidie.

— Oh ! pardonnez-moi, Monsieur le recteur, dit Anna au moment de s’éloigner ; ayez pitié d’une pauvre folle ; car je suis folle de l’anxiété qui m’accable à cause du sort de Julien. Ne pouvant le voir, lui, je voulais du moins reconnaître la lumière de son vaisseau. Ah ! je suis bien malheureuse !

— Je le sais, mon enfant, et je partage vos chagrins ; mais prenez courage ; mettez vos peines dans les mains de Dieu. Il sauvera votre mari et vous le rendra… À présent, allez en paix ; puis, dès que vous aurez rassuré votre tante, faites éveiller Madec et le père Lizon, et dites-leur de se rendre en toute hâte auprès de la grande roche qui domine le port. Je crains d’avoir besoin de leurs bras. Adieu.

Le vent augmentait de violence et soulevait déjà les lames ; une pluie froide commençait à tomber ; mais qu’importait à M. Tanguy. Les obstacles, loin de l’abattre, donnaient du ressort à son âme vaillante et dévouée. Son corps, usé par l’âge et les travaux, mais vivifié par la charité, obéissait à l’ardeur de son zèle et se trouvait capable d’endurer toutes les fatigues, toutes les souffrances, de tenter toutes les entreprises