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FANTÔMES BRETONS


— Vous ne passerez pas, s’écria M. Tanguy, dont le grand cœur frémissait ; vous ne passerez pas, et je vous arrête. Je vous arrête comme coupable de la perte d’une chaloupe, et, de plus, pour complot et trahison ; oui, trahison, car on vous a vu allumer un fanal sur la pointe de l’île, et l’on sait que des ennemis ont accosté…

Le Nantais fut d’abord un peu déconcerté de voir que le recteur avait découvert en grande partie les machinations qu’il comptait tenir secrètes. Il parut éprouver un moment d’hésitation en présence du courageux sang-froid dont le prêtre venait de faire preuve ; mais cette impression ne fut que de courte durée. Il reprit en peu de temps son audace habituelle et s’écria avec une grossière ironie :

— Ah ! vous prétendez m’arrêter, vous, corbeau de malheur ! et vous croyez apparemment que Corfmat va tout bonnement se laisser bloquer comme un novice… Hein ! recteur, vous voulez rire ; mais ça ne prendra pas. Ainsi, vite au large.

— Non, vous ne partirez pas, répondit M. Tanguy en se plaçant entre Corfmat et la mer, vous ne partirez pas, vous dis-je. Vous répondrez de vos actions ; nous saurons ce que vous avez comploté ; nous…

Ces paroles furent interrompues par la plus infâme agression que puisse commettre un homme égaré. Corfmat osa porter la main sur le ministre de Dieu, qu’il frappa rudement en pleine poitrine.... Il allait sans doute, dans sa fureur, pousser dans la mer le vieillard intrépide qui osait lui résister, quand tout à