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LE RECTEUR DE L’ÎLE DE HOUAT


gens. Moi, je fais ici ce qui me plaît ; ça ne vous regarde pas.

— Vous avez fait un mauvais coup, Corfmat ; vous avez voulu perdre une embarcation, par vengeance, peut-être : celle de Madec ou celle du pauvre Lizon. Savez-vous que c’est une lâche action, cela ?

— Ça m’est bien égal, à moi, vieux radoteur ; rangez-vous et laissez-moi passer, dit le bandit furieux en brandissant une gaffe.

— Je ne crains rien, Corfmat ; je n’ai jamais tremblé devant les hommes, vous le savez… Et puis, vous n’oseriez frapper un vieillard, un prêtre…

— Un prêtre ! Et pourquoi pas, s’il veut me barrer le passage ?

— Parce que ce prêtre vous conseille de ne pas ajouter un crime à une action déjà trop condamnable.

— Ah ! ah ! la belle affaire, vociféra le matelot. Est-ce ma faute, à moi, s’ils mettent de mauvaises amarres à leurs chaloupes ?

— Vous ne me donnerez pas le change, misérable ; c’est vous qui avez coupé l’amarre, et…

— Et poussé au large : c’est vrai, je m’en vante ; et de plus, j’ai donné plus de dix coups de hache dans les bordages de ce vieux sabot, où les cancres peuvent déjà s’amuser. Ah ! ah ! Place, place au brave Nantais.

— Malheureux ! revenez à vous !

— Place vieux cormoran, ou bien venez me servir un coup à votre cambuse, sinon je vas y mettre le feu, après avoir démoli tous les you-yous des Houatais.