Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/213

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

217
LE FILS DU PILLEUR


Mais toi, si tu peux presser dans tes bras ce cher ange qui voudrait t’apaiser, c’est à mon fils, au pauvre Franz que tu le dois…

— C’est faux, s’écria Christophe blême de fureur.

— C’est la vérité ; demande à ta fille qui l’a tirée de l’eau un soir…

— Dis donc qu’elle ment, interrompit le brigadier en repoussant Martha suffoquée par les sanglots.

— Écoute encore, Christophe, je n’ai pas fini. Oui, Franz a sauvé ta fille, et comme le bon Dieu voulait te confondre encore plus, il t’a fait briser ton canot sur la pointe là-bas. Enfin c’est le fils du forban, du forban que tu as tué, c’est lui qui t’a sauvé et ramené mourant à terre au péril de sa vie !

— Mille ouragans ! hurla Brionel, fou de rage. Sors d’ici ; va-t-en ! pilleuse, va-t-en !!

— Oui, je pars, dit la veuve avec calme ; je puis partir, car tu sais maintenant ce que le pilleur méprisé a fait pour toi ! Que le ciel te pardonne à cause de ta fille. Adieu !


V

S’il est ici-bas une douleur, une angoisse que l’on ne peut peindre, il en est à plus forte raison que l’on ne saurait supporter sans faiblir… sans mourir peut-être ! La douleur et l’angoisse de la pauvre Martha furent de ce nombre. La dernière scène dont elle fut le triste et impuissant témoin contre un père de qui l’âme endurcie était violente comme l’ouragan, cette