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FANTÔMES BRETONS


sans éveiller l’attention d’un vieux marin, attaché depuis un grand nombre d’années au service de Rochelan, et dévoué, par une affection toute paternelle, à la personne du jeune Abel.

— Ne cours donc pas si fort, mon enfant, lui dit le vieux Jacques ; il va faire nuit noire et tempête.

— C’est justement à cause de la tempête, répondit Abel, que je cours à la côte… Mais dépêchons, car il me semble que je vois, là-bas, au large…

— Oui, au large de la pointe d’Enfer, les feux d’un navire qui cherche le port.

— S’il y avait seulement un signal sur ces rochers !

— J’ai entendu dire, reprit le marin, qu’autrefois, quand cette chapelle était en bon état, tous les soirs de gros temps, on avait soin d’allumer un fanal dans le clocher…

Ces paroles rendirent Abel pensif, et il ralentit le pas en marchant le long des murs de Lok-Maria.

— Si j’y plaçais mon fanal ? s’écria-t-il tout à coup.

— Sans doute, c’est une idée, une véritable idée de matelot… Mais l’escalier de la tourelle est presque démoli ; comment se hisser là-haut ? La moitié des enfléchures sont tombées.

— Regarde, regarde ; miracle ! une lumière vient de s’allumer dans le clocher !

C’était la vérité : une clarté brillait au sommet des ruines, et, après avoir considéré plus attentivement, ils distinguèrent, comme une silhouette découpée sur le ciel sombre, la forme d’une petite paysanne.