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Page:Du Laurens de la Barre - Fantômes bretons.djvu/37

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PILOTE ET GOËLAND


sa tête. Pilote crut distinguer un cri, au milieu des hurlements de la tempête, lorsqu’une lame plus haute que les autres le submergea lui-même et fit sombrer la chaloupe.

— Sauve-la ! sauve Jane, mon Goëland ! s’écria-t-il, en fendant les flots, à la suite du vaillant animal…

Un quart d’heure après, sur la grève, des marins, attirés par le bruit du sinistre et par l’humanité, recueillaient les corps de plusieurs naufragés. Deux ou trois, qui respiraient encore, furent transportés dans leurs maisons ; mais on cherchait vainement le capitaine et sa fille, quand tout à coup on vit, à peu de distance, paraître au dessus des flots qui s’apaisaient un peu, la tête de Goëland. Il semblait rendu au bout de ses forces. Sa tête plongeait de temps à autre et des hommes émus se mirent à l’eau pour lui porter secours.

Ô surprise ! le chien n’était pas seul : il traînait par son vêtement le corps d’une femme que les marins se hâtèrent d’arracher aux ondes. Ils voulurent aussi aider Goëland exténué à gagner le rivage ; mais Goëland était déjà loin dans la mer. Sa tête, cette fois, était haute et se tournait de tous côtés, comme s’il eût cherché à découvrir quelque chose.

— Pauvre bête ! il cherche son maître ! dit un des pêcheurs. Il nage si bien, qu’il le trouvera.

— Il le trouvera, pour sûr, répondit un autre, mais comme la fille du capitaine… Voyez, elle ne respire plus… c’est fini ! Allons, les garçons, une chaloupe à la mer pour sauver Misaine !