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FANTÔMES BRETONS


c’est que Dieu l’a permis… pour instruire les hommes… Pourtant, vu la rigueur de la saison, fais en sorte, ma fille, qu’un petit coin soit conservé, pour nous abriter, moi et mon pauvre chien. »

Ce rêve rendit quelque confiance à la bonne Brigitte. Cependant, quand arriva le jour où l’on devait commencer la démolition de la chapelle, elle sentit redoubler sa douleur ; puis, comme poussée par une subite inspiration, elle sortit de grand matin, cueillit dans le verger quelques branches d’arbre vert et prit le chemin du bois.

Le soleil se levait sur la montagne et faisait scintiller le givre qui tremblotait aux branches dépouillées du taillis. De rapides frissons passaient dans les ramées avec la bise d’hiver. Quelques oiseaux chantaient tristement, comme pour appeler des jours meilleurs. Brigitte entra plus calme dans la chapelle solitaire ; elle disposa, comme d’habitude, des rameaux verts devant l’image de saint Roch, et se mit en prière, dans un coin obscur, au milieu de ce silence que l’on pourrait nommer céleste et dans lequel, à force de recueillement, on croit entendre comme les voix d’un autre monde… Tout à coup, deux hommes entrèrent à grand bruit : ils portaient une échelle, des marteaux, une hache et autres outils nécessaires à leurs travaux.

L’échelle fut dressée contre le mur ; l’un des hommes y monta avec assez de résolution, mais l’autre ouvrier, un jeune paysan, dit à son compagnon :

— C’est besogne maudite que nous allons faire ici. Qu’en pensez-vous, maître Pierre ?