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LA CHAPELLE DE COAT-AR-ROCH


domaine. C’était un avare endurci, qui ne voyait rien au dessus de son commerce. Il se nommait Grall-Penvern ; mais les paysans, pour le récompenser de sa perfidie, l’avaient baptisé Fallorch (plus mauvais). Grall ne s’était point marié, par suite de son avarice, et vivait seul avec son unique sœur, bonne et pieuse créature, détachée des choses de la terre autant que son frère tenait à ses intérêts et à sa fortune.

Le marchand de fil avait toujours contrarié la vocation religieuse de sa sœur Brigitte. Soumise et résignée comme une sainte, elle attendait avec patience et ne voulait pas quitter Penvern, dans l’espoir de le ramener un jour à de meilleurs sentiments.

Sachant déjà combien la chapelle de Coat-ar-Roch (autrement dit, de Saint-Roch) était en vénération dans le pays, Brigitte se réjouissait à l’idée d’y donner tous ses soins et d’embellir le sanctuaire que la Providence semblait lui confier. On comprendra quelle fut sa douleur, lorsque Falloc’h, entre deux vins, et disant qu’il n’y avait plus ni Dieu ni saints, lui annonça son intention de démolir la chapelle, pour en vendre les matériaux et défricher l’emplacement. Sœur Brigitte (on l’appelait ainsi pour honorer sa piété), ne put protester que par ses larmes et par ses prières.

Mais, la nuit suivante, dans un songe, il lui sembla voir saint Roch apparaître, la face blême et montrant du doigt l’ulcère qui couvrait son genou.

« Ne pleure pas, chère fille, murmurait saint Roch attendri ; si le méchant porte la main sur mon asile,