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NOTES.

avait[1] recueilli, restauré et préservé des atteintes de la barbarie, s’est trouvé en peu de jours dispersé, pillé, et en grande partie détruit[2] par l’effet d’une mesure irréfléchie, prise intempestivement par le ministre d’un gouvernement réparateur.

Sans doute, il pouvait, il devait même répugner à ce gouvernement de conserver comme siens plusieurs monuments, dont l’enlèvement, si on ne tient compte des époques et des circonstances, pouvait avoir le caractère de la spoliation ; mais d’abord cette considération n’existait pas pour les provenances (et c’était le plus grand nombre) des abbayes, couvents, châteaux, églises abandonnées et autres propriétés de main morte. La destruction de ces établissements étant irrémédiable, la tourmente révolutionnaire nous léguait du moins ces épaves.

  1. La part de gloire de la Convention, sous le règne de laquelle ce musée prit une extension qui s’accrut beaucoup sous l’Empire, consiste à n’avoir pas détruit l’œuvre de l’Assemblée constituante, qui, en même temps qu’elle décrétait, en 1790, que les biens du clergé appartenaient à la chose publique, remettait à son comité d’aliénation le soin de veiller à la conservation des monuments des arts dépendant des établissements supprimés. Il faut ajouter, pour être juste, qu’un décret du 5 brumaire an 11 de la République défendit de détruire, mutiler et altérer, en aucune manière, les monuments des arts, sous prétexte de faire disparaître les signes de la féodalité. Quel ordre dans le désordre, et quel contraste avec ce que nous avons vu et voyons encore !
  2. Sans donte, une portion de ces monuments a été recueillie par le gouvernement même. L’église de St.-Denis, celle de la Sorbonne, celle de Cléry, etc., ont reçu les plus importants. D’autres très-remarquables se trouvent classés dans la partie du musée des sculptures, qui avait été nommée Musée d’Angoulême, sous la direction éclairée de M. le comte de Clarac, dont le zèle ardent et les grandes connaissances en matière d’art, manifestées d’ailleurs par le bel ouvrage qu’il publie, offrent toute garantie pour leur bonne conservation ; mais, indépendamment de leur dispersion déjà fâcheuse, la mutilation d’un très-grand nombre, et le détournement de ce qu’il était devenu loisible à chacun d’enlever, en l’absence de toute surveillance, ne sont pas moins des faits constants.