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NOTES.

histoire de l’art pour ces époques[1], si elle existe, ne repose souvent que sur des suppositions, sur des traditions apocryphes, et plus souvent encore sur des divagations. Nos dictionnaires historiques, nos innombrables biographies sont pléthoriquement gonflés de détails sur la vie et les ouvrages d’obscurs sophistes, théologiens ou scoliastes, dont les insipides controverses et les inutiles travaux en tous genres ne purent jamais promettre ni porter aucun fruit ; et c’est moins à leurs travaux qu’à la publicité de certains débats académiques, politiques, ou touchant à des intrigues de cour, ou aux disputes religieuses, que beaucoup d’artistes doivent d’y figurer[2]. Mais demandez à ces légendes analytiques de nos gloires diverses, où et quand naquirent notre Phidias (Jean Goujon), son rival Pierre Bontems, l’auteur de l’admirable mausolée de François Ier, et cent autres artistes seulement de la même époque, qui n’admet plus l’excuse banale des ténèbres du moyen âge. Cherchez-y en quelle

  1. Ce n’est guère que vers la fin du 16e siècle qu’on a commencé à s’occuper, en France, des arts, comme spécialité. Les ouvrages d’architecture d’Androuet du Cerceau ouvrirent la marche, et André Félibien et ses deux fils généralisèrent, à partir du milieu du 17e siècle, ces belles études, quelquefois reprises, mais toujours trop négligées pour que leur réunion puisse compléter une suite d’observations, encore moins un corps de doctrines. Caylus et d’Agincourt se firent presque grecs et romains. Quant à Millin…
  2. Oserons-nous ajouter que dans les nombreuses associations savantes ou supposées telles, créées ou qui se créent encore tous les jours pour explorer notre histoire et nos antiquités, on n’a jamais dirigé jusqu’ici la discussion sur l’art proprement dit, et sur les moyens de combler, par des recherches dans les manuscrits, par la publication des miniatures, évocation parlante du moyen âge, des lacunes qui nous rejettent à tout instant dans le champ des conjectures. En revanche, les dissertations sur les dolmens, les menhirs, les quatre mille pierres levées ou non de Carnac, les tombelles, etc., formeraient seules une bibliothèque, et ne laissent par conséquent rien à désirer, si ce n’est une solution.