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NOTES.

était pas moins compromise ; mais de qui eût-il pu dépendre de changer cette organisation sociale, avant que de grands mouvements politiques et religieux en préparassent les moyens, dans un pays placé en grande partie, comme était encore la France au douzième siècle, sous la suzeraineté de l’empire d’Allemagne et de l’Angleterre, et sous des ducs indépendants.

Ne voit-on pas, dès les premières croisades, Louis VI accorder de plein gré, et les seigneurs vendre des chartes royales et seigneuriales ? Si cet affranchissement des communes et des feudataires se trouva restreint vers la fin du xive siècle, par le pouvoir royal[1], le pays conserva

  1. Soyons francs avant tout, et justes, s’il est possible de l’être en semblable matière. Ce fut sans doute dans l’intérêt de leur pouvoir, balancé et souvent menacé par la puissance féodale des grands vassaux, que nos rois, imités ensuite par ces seigneurs eux-mêmes, cédèrent, dès la fin du xie siècle, aux vives sollicitations de la bourgeoisie, en rétablissant le pouvoir municipal, complètement anéanti sous la seconde race ; mais ces bienfaits n’en demeuraient pas moins acquis aux populations. S’ils leur échappèrent trois siècles plus tard, la faute en fut peut-être autant à l’abus qu’elles firent de ces premières concessions de liberté conditionnelle, qu’à la disposition des souverains à ressaisir leurs dons, quand le pouvoir royal se consolida.

    Les effroyables excès de la jaquerie, alors que le roi Jean le Bon venait de constituer le tiers-état, dans l’assemblée de la nation de 1355 ; le massacre des nobles, de leurs femmes et de leurs enfants ; le pillage et l’incendie des châteaux, crimes dont nous avons vu la fidèle et sanglante reproduction dans des circonstances politiques presque analogues, n’indiquaient que trop les dispositions des populations vers le milieu du xive siècle. Bientôt l’audacieuse férocité du prévôt Marcel, le Péthion du temps, rendant le fils de son roi témoin obligé du massacre de ses amis, et l’affublant du chaperon de la liberté, insulte dont nous avons vu également l’infâme parodie, vint prouver aux souverains qu’avec l’aristocratie populaire, plus encore qu’avec sa rivale, il y allait de leur trône. Il n’est donc pas étonnant qu’après les sanglantes scènes des Maillotins, la sédition rouennaise et le soulèvement de Paris en l’absence de Charles VI, ce roi, dit cependant le Bien-Aimé, ait à son retour mis à profit le prestige de sa victoire de