Ce sont les ouvrages tels que ceux de Proudhon, de Renan, de Buckle, de Schopenhauer et de Darwin qui ont produit les plus fâcheux effets sur le sens moral de la Russie. Cela se conçoit facilement, car il n’existe pas dans ce pays de chaires de philosophie dignes de ce nom, ni dans les universités, ni dans les séminaires ; aussi les jeunes gens sont-ils incapables de juger à fond des ouvrages de forme paradoxale. Ne pouvant pas discerner le vrai du faux, ils adoptent de bonne foi les plus grandes énormités, les théories les plus malsaines. Les auteurs que j’ai nommés plus haut ont produit en Russie ce que M. Tourgueneff a nommé le nihilisme, qui n’est autre chose que la négation de tout, de la religion, de la patrie, de la famille. Cette funeste tendance, conséquence directe de lectures mauvaises, a eu de déplorables résultats.
Si l’inspiration divine donne une grande puissance de bien aux livres de la Bible, l’inspiration diabolique d’un ouvrage est une puissance de mal, et l’influence de la littérature malsaine est si pernicieuse que l’on peut dire que, même chez ceux qu’elle ne corrompt pas, elle laisse derrière elle dans les âmes comme une odeur de mort.