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Visites des envoyés de la Cour.

C’est surtout lorsqu’un kin tchai ou envoyé de la cour, rend visite aux grands mandarins des lieux par où il passe, qu’on observe religieusement toutes les formalités prescrites, soit pour la manière de le recevoir, soit pour le cortège qui doit l’accompagner.

Lorsqu’il sort pour aller faire ses visites, la chaise sur laquelle il est porté, est précédée d’environ trente personnes rangées deux à deux, dont les uns portent à la main des bassins de cuivre qu’ils frappent de temps en temps en forme de tambour, les autres portent des drapeaux, ceux-ci de petites planches de bois vernissées, où l’on voit en gros caractère d’or Kin tchai ta gin, c’est-à-dire, Seigneur envoyé de la cour ; il y en a qui ont le fouet à la main, d’autres portent des chaînes : plusieurs portent sur l’épaule certains instruments peints de diverses figures et dorés, les uns en forme de grosses crosses terminées par des têtes de dragon, et les autres en forme de bâtons de chantre ; quelques-uns ne sont distingués que par un haut bonnet de feutre, de figure cylindrique et de couleur rouge, duquel pendent deux grosses plumes d’or, et qui sont gagés seulement pour crier par les rues, et avertir le peuple de faire place.

A la tête de cette marche est un portier ou petit officier du tribunal, qui porte dans un portefeuille les tie tsëe, ou billets de visite, qu’il a fait préparer auparavant, pour tous les mandarins et autres personnes distinguées qu’il veut visiter. Aux deux côtés de la chaise, marchent deux ou quatre domestiques proprement vêtus. Enfin cette marche est fermée par plusieurs autres domestiques du kin tchai ; car tout le reste de ceux qui accompagnent, sont des gens gagés et entretenus exprès, pour escorter l’envoyé tout le temps qu’il doit séjourner dans une ville.

Il y a encore quinze personnes qui ne sortent point de sa maison. Six se tiennent à la porte avec des hautbois, des fifres et des tambours qui semblent gagés pour étourdir à tout moment le voisinage du bruit de leurs instruments, ce qu’ils font particulièrement, toutes les fois que quelques personnes de considération entrent ou sortent de la maison. Le reste est occupé aux offices du dedans.

La manière dont les mandarins doivent recevoir un envoyé de la cour, est également accompagnée de cérémonies, auxquelles ils n’oseraient manquer. On les connaîtra par la réception qui se fit à Nan tchang fou au père Bouvet, lorsqu’accompagné d’un grand mandarin nommé Tong lao ye, il fut envoyé en cette qualité par l’empereur en Europe. Il avait fait le voyage jusqu’à cette ville, partie à cheval, partie en chaise, et ce ne fut que là qu’il prit des barques.

Dès qu’ils furent arrivés, ils trouvèrent une de ces barques grosses comme des navires de médiocre grandeur, toutes peintes et dorées, qu’on avait préparées pour leur voyage. Avant que de s’embarquer, les sous-secrétaires du viceroi et des grands mandarins, qui avaient été envoyés au devant d’eux, présentèrent selon l’usage des tie tsëe, ou billets de compliments de la part de leur maîtres. Ils passèrent ensuite la rivière.

La barque n’eut pas plus tôt touché l’autre rivage, qu’ils trouvèrent le viceroi et les grands mandarins de la ville, qui venaient les recevoir, qui